6. Chapitre 2 : La notion de la discrimination au logement

Dernière mise à jour : 02/08/2023
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La discrimination au logement fait partie des discriminations pratiquées et les lois françaises tendent à lutter activement contre tout type d’injustice dans l’accès au logement.

La loi n°89-462 du 6 juillet 1989 vise à améliorer l’environnement locatif et à limiter la discrimination.

Article 1 de la loi du 6 juillet 1989

« Le droit au logement est un droit fondamental ; il s’exerce dans le cadre des lois qui le régissent.

L’exercice de ce droit implique la liberté de choix pour toute personne de son mode d’habitation grâce au maintien et au développement d’un secteur locatif et d’un secteur d’accession à la propriété ouverts à toutes les catégories sociales.

Aucune personne ne peut se voir refuser la location d’un logement pour un motif discriminatoire défini à l’article 225-1 du Code pénal.

En cas de litige relatif à l’application de l’alinéa précédent, la personne s’étant vu refuser la location d’un logement présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Les droits et obligations réciproques des bailleurs et des locataires doivent être équilibrés dans leurs relations individuelles comme dans leurs relations collectives. »

L’article 225-1 du Code pénal retrace les motifs de discrimination prohibés par l’article 1 de la loi du 6 juillet 1989

« Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques sur le fondement de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur grossesse, de leur apparence physique, de la particulière vulnérabilité résultant de leur situation économique, apparente ou connue de son auteur, de leur patronyme, de leur lieu de résidence, de leur état de santé, de leur perte d’autonomie, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs mœurs, de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur qualité de lanceur d’alerte, de facilitateur ou de personne en lien avec un lanceur d’alerte au sens, respectivement, du I de l’article 6 et des 1° et 2° de l’article 6-1 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, de leur capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une Nation, une prétendue race ou une religion déterminée.

Constitue également une discrimination toute distinction opérée entre les personnes morales sur le fondement de l’origine, du sexe, de la situation de famille, de la grossesse, de l’apparence physique, de la particulière vulnérabilité résultant de la situation économique, apparente ou connue de son auteur, du patronyme, du lieu de résidence, de l’état de santé, de la perte d’autonomie, du handicap, des caractéristiques génétiques, des mœurs, de l’orientation sexuelle, de l’identité de genre, de l’âge, des opinions politiques, des activités syndicales, de la qualité de lanceur d’alerte, de facilitateur ou de personne en lien avec un lanceur d’alerte, au sens, respectivement, du I de l’article 6 et des 1° et 2° de l’article 6-1 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 précitée, de la capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français, de l’appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une Nation, une prétendue race ou une religion déterminée des membres ou de certains membres de ces personnes morales.

NOTA : Conformément à l’article 18 de la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022, ces dispositions entrent en vigueur le premier jour du sixième mois suivant sa promulgation. »

En clair :

La loi du 6 juillet 1989 présente les interdictions de refuser l’accès à un logement sur des motifs non fondés et prohibés par le droit français et/ou européen, et ce, tout au long du processus d’accès au logement (de la rédaction du contenu de l’offre à la sélection des candidatures et signature du contrat de bail.

La discrimination aux logements privés

La lutte contre la discrimination s’applique à tous les types de logement, que ce soit dans le parc privé ou social. Nous avons vu toutes les notions qui devaient être écartées dans la sélection des dossiers pour éviter toute discrimination qui serait prohibée et fortement sanctionnée par la loi. Tout individu est libre de disposer de ses libertés pour le choix de son habitation et d’accéder à un logement décent.

Dans cette partie, nous allons étudier plus en détail les spécificités de l’accès au logement dans le parc privé afin d’éviter toute discrimination. Il est nécessaire d’être d’autant plus vigilant que la discrimination directe est très courante dans le logement privé. Restez vigilant !

Un dossier de location dans le parc privé

Afin que sa candidature puisse être étudiée dans les meilleures conditions, la loi autorise la réclamation des documents suivant :

  • Une pièce d’identité valide (carte d’identité, passeport, etc.)
  • Les 3 dernières fiches de salaire des candidats
  • Le dernier avis d’imposition possédé
  • Une copie du contrat de travail
  • La dernière quittance de loyer du logement actuel (si possible)
  • Un relevé d’identification bancaire
  • Un dépôt de garantie d’un montant égal à un montant raisonnable (soit un mois de loyer)

Tous ces documents permettent d’établir et de vérifier la situation des candidats. Néanmoins, sont interdits par la loi les documents suivant :

  • Une photo d’identité
  • Une copie de la carte vitale
  • Une attestation de bonne tenue de compte bancaire
  • Un document indiquant que le candidat n’a pas de prêt en cours
  • Une copie du contrat de mariage ou tout document attestant d’un jugement de divorce, etc.
  • Un document attestant de l’état de santé du candidat
  • Un chèque de réservation de logement
  • Le casier judiciaire
  • Un dépôt de garantie supérieur à un mois de loyer jugé abusif

Aucune discrimination ne peut être tolérée sous le motif d’une origine, d’un passif ou d’un contexte médical compliqué, d’une situation de colocation, de famille nombreuse, etc.

La discrimination aux logements sociaux

Si la discrimination directe est plus présente dans le cas de la location du parc privé, c’est la discrimination indirecte qui touche le logement social, plus difficile à desceller.

Une telle discrimination peut supposément être imputée à une pénurie des logements, bien que toute forme de discrimination soit fortement prohibée par la loi.

Alors, comment détecter un cas de discrimination indirecte ? Quelques indices vous peuvent être la source de discrimination :

  • Un refus de prise en compte d’une demande de logement social (hormis sur le motif d’une situation irrégulière ou un dépassement du plafond de ressources).
  • Un délai excessif dans le traitement de la demande de logement.
  • Un refus d’attribution de logement social sous un motif non recevable et/ou faux (un dépassement du plafond de ressources quand ce n’est pas le cas, etc.).

Les sanctions appliquées dans le cadre de la discrimination de l’accès au logement

Article 225-2 du Code pénal 

« La discrimination définie aux articles 225-1 à 225-1-2, commise à l’égard d’une personne physique ou morale, est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende lorsqu’elle consiste :

1° A refuser la fourniture d’un bien ou d’un service ;

2° A entraver l’exercice normal d’une activité économique quelconque ;

3° A refuser d’embaucher, à sanctionner ou à licencier une personne ;

4° A subordonner la fourniture d’un bien ou d’un service à une condition fondée sur l’un des éléments visés à l’article 225-1 ou prévue aux articles 225-1-1 ou 225-1-2 ;

5° A subordonner une offre d’emploi, une demande de stage ou une période de formation en entreprise à une condition fondée sur l’un des éléments visés à l’article 225-1 ou prévue aux articles 225-1-1 ou 225-1-2 ;

6° A refuser d’accepter une personne à l’un des stages visés par le 2° de l’article L. 412-8 du code de la sécurité sociale.

Lorsque le refus discriminatoire prévu au 1° est commis dans un lieu accueillant du public ou aux fins d’en interdire l’accès, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende. »

Article 432-7 du Code pénal

« La discrimination définie aux articles 225-1 et 225-1-1, commise à l’égard d’une personne physique ou morale par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission, est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende lorsqu’elle consiste :

1° A refuser le bénéfice d’un droit accordé par la loi ;

2° A entraver l’exercice normal d’une activité économique quelconque. »

Les moyens pour prouver une discrimination

Il est important de savoir comment prouver la discrimination afin de pouvoir faire valoir les droits de vos clients. Cependant, il n’est pas toujours possible de prouver la discrimination de manière concluante, cela est une manœuvre très difficile. Le succès d’une telle démarche va demander de créer un dossier solide et fourni.

Ce qu’il est important de prendre en compte, c’est qu’une dénonciation de discrimination peut être déposée à n’importe quel moment pour le locataire s’il pense en être victime. Il doit apporter des preuves (échanges de courriels, rendez-vous annulé, enregistrement d’un échange téléphonique, etc.), expliquer le sentiment d’injustice… Toutes ces présomptions devront être justifiées par le bailleur. C’est à lui de prouver son innocence.

Autrement, il est également envisageable de procéder au « test de situation ». La discrimination est prouvée lors d’un cas réel pour apporter une preuve concrète et mettre en avant les véritables critères de sélection de l’agence.

L’organisme du Défenseur des droits

Le Défenseur des droits est une institution indépendante de l’État créée par la loi n° 2007-1545 du 30 octobre 2007. Il est chargé de défendre les droits et libertés des personnes, de veiller au respect de l’égalité et de la non-discrimination, et de promouvoir l’accès au droit et à la justice, selon ses 4 domaines de compétence :

  • La défense des droits des usagers des services publics
  • La défense des droits de l’enfant
  • La lutte contre les discriminations
  • Le respect de la déontologie par les personnes exerçant des activités de sécurité (police, gendarmerie, etc.).

Le Défenseur des droits peut être saisi par toute personne qui estime que ses droits ont été violés ou qu’elle a été victime d’une discrimination, que ce soit par courrier postal ou électronique, par un délégué du Défenseur des droits, ou le formulaire en ligne du site officiel. Il peut également se saisir d’office de certains dossiers.

Le Défenseur des droits peut mener des enquêtes, rendre des avis et formuler des recommandations. Il peut également saisir le juge administratif ou le juge judiciaire pour appliquer un service de médiateur, ou encore appliquer des sanctions.

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